Les économistes reconnaissent depuis longtemps que le commerce international est un moteur essentiel du bien-être et de l’efficacité à l’échelle mondiale. La prolifération des accords de libre-échange (ALE) souligne ce large consensus sur les avantages du commerce international.
Le Canada illustre cet engagement envers le libre-échange avec 15 ALE couvrant 51 pays, ainsi que des accords sur la promotion et la protection des investissements, des accords plurilatéraux et des engagements dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Ces accords visent à accroître le bien-être sociétal en améliorant la productivité du travail, en offrant aux consommateurs une gamme plus large de produits et services à des prix inférieurs, en supprimant les barrières commerciales, en réduisant les coûts du commerce et en renforçant les liens internationaux. Selon la Banque du Canada, près de 1 emploi sur 6 est lié aux exportations et les estimations suggèrent que les revenus canadiens sont de 15 à 40 % plus élevés grâce à la libéralisation des échanges.
Les droits de douane ayant atteint des creux historiques, une plus grande attention a été accordée à la réduction des formalités administratives réglementaires et à la garantie d'une approche inclusive qui voit les bénéfices du commerce largement partagés, y compris entre les PME.
Ces dernières années, le commerce mondial a été confronté à une « polycrise » caractérisée par des chocs de l'offre et de la demande liés à la pandémie, aux fluctuations des prix de l'énergie et des matières premières, aux tensions géopolitiques et aux perturbations de la chaîne d'approvisionnement. Plus récemment, les conditions macroéconomiques et la guerre en Ukraine ont exercé d’importantes pressions inflationnistes qui limitent les salaires et les revenus réels, en particulier dans les économies avancées en 2022 et 2023. Cela a conduit à une réduction des importations en 2023, entraînant une baisse du volume du commerce mondial de marchandises par rapport à l’année précédente (-1,2 %) (voir figure ci-dessous). Toutefois, si l’on évalue les données sur une période prolongée, le commerce mondial de marchandises a fait preuve d’une résilience remarquable, avec une croissance annuelle moyenne de 2,5 % entre 2010 et 2022, légèrement inférieure à la croissance annuelle moyenne du PIB de 2,7 % au cours de la même période.
Source : Organisation mondiale du commerce (OMC), Perspectives et statistiques du commerce mondial et statistiques, avril 2024 et juillet 2023. Calculs propres de l'auteur.
Pour l’avenir, l’OMC prévoit que les volumes du commerce mondial de marchandises augmenteront de 2,6 % en 2024 et de 3,3 % en 2025, ce qui s’aligne sur les prévisions du FMI et de l’OCDE, qui anticipent également une intensification des flux commerciaux mondiaux en 2024. Néanmoins, ces projections dépendent de divers facteurs, notamment les conflits mondiaux en cours, les résurgences potentielles de l’inflation, les ralentissements économiques dus au resserrement monétaire et les tensions géopolitiques persistantes.
L'engagement du Canada à l'égard du commerce international a produit des bénéfices substantiels. En 2022, le ratio du commerce au PIB du Canada a atteint un sommet en 16 ans de 67,4 %, ce qui montre que le commerce international représentait plus des 2/3 du PIB du pays. La même année, le Canada a connu une augmentation de 21,2 % de ses exportations de biens et de services, atteignant une valeur record de 952 G$, suivie d'un nouveau record de 965 G$ en 2023. Les importations ont également atteint de nouveaux sommets, atteignant une valeur de 978 G$ en 2023. Malgré un excédent commercial en 2022, le Canada a enregistré un déficit commercial de 13 G$ en 2023, mais la balance des paiements s'est rapprochée de l'équilibre ces dernières années (voir figure ci-dessous).
Source : Statistique Canada. Tableau 36-10-0014-01 Balance des paiements internationaux, compte courant et compte capital, annuel (x 1 000 000). Récupéré le 18 juin 2024. Calculs propres de l'auteur.
Les PME jouent un rôle crucial dans le commerce mondial, puisqu’elles constituent la plupart des exportateurs. En 2023, 97 % des 48 718 entreprises exportatrices étaient des PME, contribuant à environ 40 % de la valeur totale des exportations canadiennes. Cependant, au cours de la dernière année, les grandes entreprises ont affiché la plus forte croissance d'une année sur l'autre, tant parmi les exportateurs (+5,6 %) que parmi les importateurs (+2,9 %), la valeur des exportations augmentant de 3 % pour atteindre environ 421 G$ et la valeur des importations augmentant de 6,7 % à 375 G$. En revanche, les PME ont enregistré une contraction de 8,6 % de la valeur de leurs échanges commerciaux, à 282,5 G$, et une baisse de 1,9 % de la valeur de leurs importations, soulignant les défis disproportionnés auxquels elles sont confrontées (voir figure ci-dessous).
Sources :
1. Statistique Canada. Tableau 12-10-0071-01 Commerce des biens selon les caractéristiques des importateurs, selon le niveau d’emploi de l’entreprise et le nombre de pays partenaires.
2. Statistique Canada. Tableau 12-10-0091-01 Commerce des biens selon les caractéristiques des exportateurs, selon le niveau d’emploi de l’entreprise et le nombre de pays partenaires. Récupéré le 18 juin 2024. Calculs propres de l'auteur.
Les résultats de notre dernier sondage sur le commerce international soulignent que la probabilité de s’engager dans le commerce international est en corrélation avec la taille de l’entreprise. Parmi les micro-entreprises (0 à 4 employés), 75 % déclarent ne pas participer au commerce international, contre 65 % des petites entreprises (5 à 49 employés) et 52 % des moyennes entreprises (50 employés et plus). Cette tendance est constante dans les activités d’importation et d’exportation : seulement 25 % des micro-entreprises sont impliquées dans le commerce international (qu’il s’agisse d’importation, d’exportation ou d’une combinaison des deux), tandis que les chiffres s’élèvent à 35 % pour les petites entreprises et à 48 % pour les moyennes entreprises (voir figure ci-dessous). Ces résultats montrent que les petites entreprises sont confrontées à des défis spécifiques par rapport aux grandes entreprises. Pour les petites entreprises, en raison de ressources limitées et de priorités opérationnelles différentes, il peut être plus difficile de s’y retrouver dans les complexités du commerce international.
Source : FCEI, sondage mensuel de suivi sur Les perspectives de votre entreprise, juin-juillet, 2024. Basé sur les réponses de 780 membres de la FCEI, propriétaires d'entreprises canadiennes indépendantes, de tous les secteurs et de toutes les régions du pays. À des fins de comparaison, un échantillon probabiliste avec le même nombre de répondants aurait une marge d'erreur de +/-3,5 %, 19 fois sur 20.
Les principaux obstacles au commerce identifiés par les PME comprennent les produits et services jugés non exportables (42 %) et la perception selon laquelle les marchés intérieurs répondent adéquatement à leurs besoins opérationnels (37 %). Cependant, les données suggèrent un manque de connaissances pour gérer les complexités du commerce international, ce qui empêche les PME de tirer parti de ces opportunités.
Participer au commerce international présente plusieurs défis pour les PME, tels que la gestion de cadres réglementaires complexes, les exigences de conformité et les coûts d’expédition. En fait, les coûts d'expédition sont devenus le plus grand défi pour les PME qui exportent des biens, augmentant de 15 points de pourcentage depuis 2017, touchant désormais 66 % des entreprises. Les fluctuations monétaires (56 %) et les taxes et les droits imposés sur les produits et services (50 %) posent également des défis importants (voir l’infographie). Ces coûts sont particulièrement lourds pour les petites entreprises, qui n’ont souvent pas la résilience financière des grandes entreprises pour absorber ces dépenses.
Compte tenu des complexités inhérentes au commerce international, il n'est pas surprenant que la plupart des PME ayant des activités d’importation et l'exportation s'appuient généralement sur des services de courtage ou des intermédiaires. Cette dépendance est importante, puisque 80 % des PME dépendent de l'un ou des deux services en raison de leur manque d'expertise en matière de procédures douanières, ce qui montre bien leurs défis. De plus, 42 % des PME se tournent vers des contacts commerciaux au sein de leur secteur pour obtenir des informations et de l'aide pour identifier les opportunités commerciales.
Lorsqu’on leur a posé la question suivante : « Qu’est-ce qui vous aurait aidé (p. ex., conseils, renseignements) lorsque votre entreprise a commencé à importer/exporter à l'échelle internationale? », les propriétaires de PME ont partagé divers points de vue :
« Savoir quelles informations sont nécessaires pour expédier des marchandises à l’extérieur du Canada. Jusqu'à l'année dernière, nous n'avions jamais expédié de marchandises aux États-Unis, car il était difficile de trouver des informations sur la manière de le faire. Ce serait pratique de trouver facilement le montant des droits (et de tout autre coût supplémentaire) lorsqu’on importe ou qu’on exporte des biens. »
- Commerce de gros au Manitoba
« Quels sont toutes les étapes et les coûts associés? Comment mieux prévoir les coûts, comment vérifier la qualité des connaissances des fournisseurs en matière d’importation ou d’exportation? Nous avons évité d’importe et d’exporter en raison du manque de calcul précis des coûts et de notre manque de connaissances sur la façon de procéder. »
- Entreprise manufacturière en Ontario
« Obtenir plus de ressources d’information sur le soutien et les conseils, sur les mises à jour de politiques d’importation et d’exportation. »
- Entreprise agricole en Alberta
« Réduire considérablement le nombre de pages Web sur les sites du gouvernement : il faut qu’elles soient facilement compréhensibles et qu’on puisse suivre les instructions. Il doit y avoir un moyen de NE PAS avoir à lire des tonnes de pages Web à lire pour comprendre les règles et la réglementation en matière d’exportation/importation. »
- Commerce de gros en Ontario
« On devrait avoir accès à un seul contact au sein du gouvernement pour obtenir des informations et du soutien. On ne devrait pas à avoir à chercher les services à contacter, puis finalement ne jamais obtenir de réponse. »
- Commerce de détail en Alberta
Malgré la disponibilité de services et de programmes de soutien au commerce tels que CanExport et les services des délégués commerciaux, de nombreuses PME ignorent l'existence de ces ressources ou ne les ont pas utilisées (voir la figure ci-dessous).
Source : FCEI, sondage sur le commerce international, du 18 au 29 janvier 2024. Basé sur les réponses de 2 032 propriétaires de PME, de tous les secteurs et de toutes les régions du pays. À des fins de comparaison, un échantillon probabiliste comportant le même nombre de répondants aurait une marge d’erreur de +/-2,2 %, 19 fois sur 20.
Question : Connaissez-vous les organismes suivants qui aident les entreprises souhaitant importer ou exporter des produits/services, et y avez-vous déjà eu recours? (Sélectionner une réponse pour chaque ligne)
Malgré les défis du marché au cours de la dernière année et les difficultés inhérentes au commerce international, les PME restent optimistes quant à leurs perspectives. Plus de la moitié (54 %) prévoient accroître leurs exportations à l'extérieur du Canada au cours des 3 prochaines années. Ces perspectives positives sont portées par leurs ambitions de développement (81 %) et de saisie des opportunités du marché international (74 %) (voir infographie). Relever les défis spécifiques auxquels les PME sont confrontées dans le commerce mondial pourrait renforcer davantage leur participation et leur réussite sur les marchés internationaux.
Le commerce international fait toujours partie intégrante de la stratégie économique du Canada, procurant des avantages importants en matière de création d'emplois, de croissance économique et d'amélioration du niveau de vie. Il est essentiel de renforcer les politiques commerciales qui soutiennent particulièrement les PME afin de faciliter leur accès aux marchés internationaux et de favoriser une expansion économique durable.
Voici quelques mesures de politiques publiques qui pourraient être mises en œuvre :