Le harcèlement psychologique et sexuel en milieu de travail

Le harcèlement psychologique et sexuel peut avoir de graves conséquences sur les victimes et leur entourage, mais également sur les entreprises. C’est pourquoi, au Québec, les employeurs ont des obligations à respecter pour lutter contre ce fléau dans leur milieu de travail. En tant qu’employeur, connaissez-vous bien vos obligations ?

Qu’est-ce que le harcèlement?

Tout d’abord, il est important de bien définir qu’est-ce que le harcèlement. Pour qu’il y ait harcèlement, la conduite doit :

• être vexatoire et répétée ou vexatoire et grave;

• être hostile ou non désirée;

• porter atteinte à la dignité ou à l’intégrité physique ou psychologique;

• engendrer un milieu de travail néfaste.

L’exercice de votre droit de gestion peut parfois être confondu avec le harcèlement psychologique. Afin d’éviter cette confusion, il faut rappeler que vous avez le droit de diriger vos employés, d’imposer des mesures disciplinaires et de prendre des décisions afin d’assurer la rentabilité de votre entreprise ainsi que son bon fonctionnement. L’exercice du droit de gestion doit être raisonnable et nécessaire afin qu’il ne constitue pas du harcèlement.

De plus, le harcèlement psychologique et sexuel peut se produire à tous les niveaux hiérarchiques et peut également provenir de la clientèle ou des fournisseurs. Tout le monde peut être victime de harcèlement, même vous, en tant que propriétaire d’entreprise.

Vos obligations

En tant qu’employeur, vous avez l’obligation de fournir un lieu de travail exempt de harcèlement. Pour remplir cette obligation, vous devrez :

• vous assurer d’utiliser tous les moyens raisonnables afin de prévenir le harcèlement;

• faire cesser le harcèlement lorsqu’une situation est portée à votre connaissance.

En matière de prévention, vous êtes tenus de mettre en place une politique complète de prévention du harcèlement psychologique et sexuel dans votre milieu de travail. Cette politique doit comporter un volet concernant les conduites qui se manifestent par des paroles, des actes ou des gestes à caractère sexuel, ainsi qu’un processus de traitement des plaintes. Vous devrez également nommer une personne qui sera responsable de son application.

Attention ! Si vous n’avez pas cette politique, vous pourriez recevoir une amende salée.

Ce que vous devez faire en cas de signalement ou de plainte interne

Lorsqu’une situation de harcèlement est portée à votre attention, soit par un signalement ou le dépôt d’une plainte interne, vous devez agir immédiatement et prendre la situation au sérieux. Voici les étapes à suivre :

1. Réception de la plainte ou du signalement

Qu’il s’agisse d’un signalement ou d’une plainte, la présumée victime (ou la personne qui a fait le signalement) doit fournir des détails. Elle doit préciser qui est le potentiel harceleur, la conduite dénoncée, la chronologie des événements et quels sont les témoins. Si ces informations ne vous sont pas fournies, vous devrez poser des questions afin d’obtenir des précisions quant à sa version des faits.

2. Évaluation de la recevabilité de la plainte

Une fois que la plainte ou le signalement a été reçu, vous devrez analyser tous les faits afin de déterminer si les critères propres au harcèlement sont présents. Cette analyse permettra de savoir s’il est nécessaire d’aller plus loin dans le processus, mais ne confirmera pas réellement la présence de harcèlement.

Si après analyse des faits, vous jugez qu’il n’y a pas de harcèlement, vous n’êtes pas tenu d’aller plus loin. Nous vous conseillons d’écrire un rapport pour expliquer votre démarche et votre raisonnement. Conserver ce rapport précieusement. Si toutefois la plainte était recevable, vous devrez nommer une personne responsable de l’enquête. Vous n’êtes pas tenu de nommer une personne externe, mais il est fortement recommandé de le faire.

Veuillez noter que, même si une plainte ne constitue pas du harcèlement, il est pertinent de faire une petite enquête afin de déterminer s’il n’y aurait pas un problème sous-jacent.

3. Avis aux personnes impliquées

Si la plainte est recevable, il est temps d’en aviser les personnes concernées. Vous devrez les informer des faits qui vous ont été rapportés et les aviser qu’une entrevue suivra. Donnez-leur un délai raisonnable pour se préparer.

À cette étape, vous devrez probablement prendre certaines mesures afin de limiter les dégâts pendant l’enquête. Par exemple, il pourrait être essentiel de séparer les personnes concernées et de modifier leur quart de travail temporairement.

4. Entrevues pour clarifier les faits et documentation des faits

Une fois que toutes les personnes concernées ont eu le temps de se préparer, vous devrez rencontrer chaque personne individuellement pour prendre leur version des faits. Un rapport écrit devra être fait et chaque personne concernée pourra le valider afin de s’assurer que leur version des faits a bien été comprise.

5. Analyse des informations et remise des conclusions

C’est à cette étape que la personne responsable de l’enquête devra analyser tous les faits rapportés. Après analyse des informations, les allégations pourront être prouvées ou réfutées. Cette étape doit être faite avec rigueur et c’est pourquoi il est préférable de faire appel à des professionnels pour assurer une expertise et une neutralité.

Si vous avez fait affaire avec une personne externe pour l’enquête, celle-ci devrait vous remettre un rapport écrit de l’enquête avec des recommandations. En tant qu’employeur, c’est à vous de prendre les décisions selon les conclusions de l’enquête. Si c’est vous qui avez conduit cette enquête, vous devrez également faire un rapport écrit.

 

Conclusions possibles de l’enquête

S’il y a effectivement eu harcèlement, vous devrez prendre toutes les mesures nécessaires et raisonnables pour faire cesser le harcèlement et vous assurer que cela ne se reproduise pas. Assurez-vous également d’avoir rempli toutes vos obligations et de faire des corrections au besoin.

S’il n’y a pas eu de harcèlement, mais que certains éléments sont à prendre en considération, vous devrez également prendre certaines mesures pour résoudre le problème.

Le dépôt d’une plainte à la CNESST

Même si vous avez une politique interne qui prévoit un processus de plainte, un employé qui se sent victime de harcèlement psychologique ou sexuel peut déposer une plainte directement à la CNESST. Si tel est le cas, la CNESST proposera une période de médiation qui peut être acceptée ou refusée. La CNESST mènera également une enquête afin d’analyser la recevabilité de la plainte. Si celle-ci est jugée recevable, elle sera entendue par le Tribunal administratif du travail.

En tout temps au cours du processus, l’employeur et l’employé peuvent en arriver à une entente et résoudre le problème. L’intervention de la CNESST se terminera.

Les conséquences du harcèlement pour l’entreprise

Les conséquences du harcèlement psychologique et sexuel dans l’entreprise peuvent être nombreuses. D’abord, ce genre de situation peut miner l’ambiance de travail, causer des frictions entre les membres de l’organisation, augmenter le roulement de personnel, réduire la motivation et augmenter l’absentéisme. Si le harcèlement se produisait avec des clients ou des fournisseurs, il est évident que les conséquences pourraient être graves pour la pérennité de l’entreprise. Finalement, si une plainte était déposée à la CNESST et que le tribunal jugeait que vous n’avez pas rempli vos obligations, vous pourriez être tenus d’indemniser la personne qui a initié la plainte.

Si vous avez des questions des questions concernant vos obligations ou si vous avez besoin de notre modèle de politique, contactez nos conseillers aux entreprises au 1-833-568-3234.

FAQ

Est-ce qu’il est obligatoire d’avoir une politique sur le harcèlement psychologique et sexuel au travail ?

Oui, depuis le 1er janvier 2019, toutes les entreprises, peu importe leur taille, doivent se doter d’une politique pour prévenir le harcèlement psychologique et sexuel au travail et d’un mécanisme de traitement des plaintes. Une entreprise qui ne respecte pas cette obligation est passible d’une amende pouvant aller de 600 $ à 1 200 $. En cas de récidive, le montant passe de 1 200 $ à 6 000 $.

Qui puis-je nommer comme responsable de l’application de la politique ?

Idéalement, le ou la responsable des ressources humaines serait la meilleure personne. Toutefois, comme certaines entreprises n’ont pas la capacité d’avoir un département de ressources humaines, il est possible de vous nommer comme responsable.

Est-ce je dois remettre une copie de la politique à mes employés ?

Nous vous conseillons de prendre un moment pour présenter la politique à vos employés puis d’en remettre une copie à chacun. Afin d’économiser du papier, la politique peut être envoyée par courriel ou peut être affichée à un endroit où tout le monde pourra y avoir accès en tout temps.

Est-ce les employés doivent signer la politique?

Oui. La signature permet d’assurer que tout le monde a bien pris en compte la politique et qu’ils acceptent de la respecter.

Quel est le délai pour déposer une plainte formelle à la CNESST ?

Un employé a deux ans suivant la dernière manifestation de harcèlement pour déposer une plainte.

Est-ce que je dois absolument faire affaire avec une personne externe pour conduire une enquête ?

Non. Il est possible d’attitrer une personne à l’interne ou vous-même, uniquement s’il n’y a pas de conflit d’intérêts. Sinon, il est préférable de nommer une personne externe et qualifiée.